Biomimétisme, principes du vivant et numérique responsable

Lors du Web2Day 2022, Thomas Dupeyrat de notre agence et Marion Simon du collectif 21-22, ont animé une conférence traitant du lien entre le biomimétisme et son application pour un numérique plus responsable.

 

 

Afin que vous puissiez également profiter de la présentation, vous trouverez le replay de la conférence ainsi que sa retranscription ci-dessous :

 

 

Retranscription de la vidéo :

 

Marion Simon

Bonjour. […] Nous avons envie de vous parler du rapport au vivant et de comment s'en inspirer pour essayer d'apporter des réponses aux enjeux écologiques et sociaux auxquels nous faisons face, et, comment le numérique, en particulier, peut nous y aider.

Nous n’allons pas faire de vous des experts du biomimétisme. Par contre, ce que nous voulons faire, c'est vous faire changer de regard, vous faire changer de posture, parce qu'il est essentiel de changer notre vision au monde et des crises auxquelles on fait face. Il est essentiel d'inclure la perspective des autres espèces, des écosystèmes et du système Terre dans tous nos projets. Et pour cela, nous pensons nous que le biomimétisme, l’inspiration du vivant, est un immense réservoir d'innovations. Cela va pouvoir permettre d'apporter des solutions. Et pour cela, nous allons commencer par une phrase, peut-être un peu dérangeante pour certain·es : “Un produit numérique est un organisme vivant”

 

 

Thomas Dupeyrat : 

Comme l'explique bien Fabrice de Mazery dans son livre "Responsable", un produit numérique est tout sauf inerte et froid. Il est interactif, évolutif. Il va vous solliciter. Si je prends par exemple cette table ou cette chaise, elle est froide et inerte. Elle ne va pas chercher quelque chose de vous. Par contre, si je prends mon téléphone, lui, il va attendre à ce que vous répondiez à des commentaires, il va attendre à ce que vous réagissiez à des alertes. Donc en cela, nous pouvons considérer justement qu'un outil numérique peut être considéré comme un organisme vivant. Et donc, il faut qu'il respecte exactement les mêmes règles, les mêmes principes que le vivant. C'est en ça aujourd'hui que nous allons vous parler du biomimétisme. C'est pour voir comment la nature, comment les êtres vivants réagissent aux enjeux qui sont identiques à ceux du numérique. Et, spoiler alert, il le fait bien mieux que nous.

 

 

Marion Simon

Nous avons posé le sujet. Peut-être pouvons-nous reprendre quelques définitions : c'est quoi le vivant ?

Le Vivant représente l'ensemble des espèces qui vivent à la surface de la planète. Cela va des bactéries jusqu'à l'espèce humaine, l'homo sapiens. Et on estime entre 8 à 10 millions d'espèces qui peuplent la Terre. Et les scientifiques en auraient répertorié environ 2 millions. Ces espèces qui habitent la Terre sont le résultat de près de 4 milliards d'années d'évolution. C'est cette capacité à s'adapter et cette diversité dans le vivant qui fait de la biologie un super réservoir d'innovations. Quand on sait que la nature s'est adaptée et que ce sont des essais et des erreurs qui sont sélectionnées par le processus naturel, on a de quoi s'inspirer. Par exemple, nous pouvons citer le crocodile, qui existe depuis 167 millions d'années et qui a traversé le Jurassique, on se dit qu'il a peut-être des choses à nous apprendre.

 

Et justement, c'est dans la nature que les écosystèmes fonctionnent avec plusieurs principes clé. Les premiers, c'est de dire d'utiliser le moins d'énergie et de matière possible, d'utiliser l'eau comme solvant naturel. Ou encore de miser sur les ressources abondantes plutôt que les ressources rares. Ou de ne pas générer de déchets parce que ce sont toujours les ressources des autres.

 

Pourquoi c'est intéressant de s'inspirer du biomimétisme aujourd'hui ? Nous sommes a la conjonction de plusieurs crises : la crise écologique, le changement climatique, l'effondrement de la biodiversité et des crises sociales. Comme le dit Tarik Chekchak, un ingénieur écologue expert du biomimétisme, ces crises interrogent nos modes de production et de consommation. Ce qui apparaissait comme les solutions du XXᵉ siècle deviennent les problèmes du 21ᵉ. Il est vrai que l'intelligence humaine, a permis de faire des choses incroyables, comme aller sur la Lune, mais sans prendre en compte le système Terre qui nous accueille. 

Par conséquent, nous vivons plusieurs crises, notamment à la crise des ressources. Aujourd'hui, on extrait plus de ressources que ce que le système Terre est en capacité de régénérer. On parle d'1,7 planète, alors qu'une planète, on n'en a qu'une. On parle également d'un déclin de la biodiversité d'environ 68 % des mammifères, des poissons, des amphibiens et des reptiles. Et enfin, on a atteint une telle concentration de CO2 sur la terre qu'on est en train de réchauffer de quelques degrés en même pas 150 ans la surface de la Terre, alors que la dernière fois qu'elle a pris plus cinq degrés, elle a mis dix mille ans à se réchauffer.

 

Nous pourrions penser que la tech peut résoudre tous ces soucis, car le numérique a notamment cet aspect immatériel, qui rend ses impacts sont plutôt invisibles. Mais je pense que je ne vous apprends rien si je vous dis que le numérique est tout sauf invisible.

 

Prenons un exemple très concret : le numérique dans le monde, ce sont 34 milliards d'équipements utilisateurs. Et si nous prenons l'indicateur carbone, celui des émissions de gaz à effet de serre, la fabrication et l'usage de ces équipements représentent deux tiers des émissions de gaz à effet de serre. Et le reste, ça va être en grande majorité l'usage, l'utilisation de nos data centers et de nos réseaux. Si nous prenons le secteur du numérique au sens global, dans toutes les émissions de gaz à effet de serre, cela représente 4 %. Vous allez me dire que ce n'est pas énorme ? Oui, mais le problème, c'est que c'est sa croissance très très forte et le fait qu'elle n'est pas prête de s'arrêter.

 

On parle de 40 % d'augmentation du volume de données par an, de 26 % d'explosion du trafic sur les réseaux ou encore de 9 % d'augmentation du parc de smartphones. Donc les enjeux de redirection du numérique vont être sur la sobriété. La sobriété des flux, le choix de ces flux et la circularité de nos équipements. Comment allonge-t-on la durée de vie de tous ces équipements ? Et, comme le dit si bien Einstein, on ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l'ont engendré.

 

Aujourd'hui, il faut penser les solutions numériques pour qu'elles ne deviennent pas les problèmes de demain. Il n'est donc plus question d'exploiter la nature, mais bel et bien maintenant de limiter cette pratique. En plus de s'inspirer du vivant, cela permet de replacer la place de l'humain dans tout l'écosystème terre. Et de voir à quel point on est dépendant de la nature. La nature nous offre des services, on ici parle de services écosystémiques, de plus, elle nous les offre gratuitement. C'est par exemple grâce à la photosynthèse des plantes que l'on respire. C'est par exemple grâce à la fourniture de matières et de matériaux que l'on se soigne, que l'on se loge ou encore c’est grâce à la pharmacopée des plantes que l'on se soigne.

 

Pourquoi faire du biomimétisme aujourd'hui ? Et bien parce que, comme le dit Jeanine Benyus, une Etats-unienne qui a conceptualisé ce principe de biomimétisme, c'est l'idée d'innover en s'inspirant du vivant, mais en le faisant bien, en le faisant de manière éco conçue et soutenable. S'inspirer du vivant, c'est bien, mais si c'est pour continuer de le détruire, ça n'a aucun sens. Donc nous, une des définitions qu'on vous propose, c'est celle-ci : le biomimétisme, c'est l'art de s'inspirer et de collaborer avec la nature pour innover de manière durable et soutenable afin de répondre aux enjeux de notre époque. C'est une discipline qui doit être pluridisciplinaire, on part de la biologie au sens large mais on y ajoute du management, du design, des architectes, des ingénieurs des sciences des matériaux, et également des philosophes, des artistes etc….

 

Et pour terminer sur le biomimétisme, il y a 3 manières de s’inspirer de la nature :

 

  • La première ça va être de s’inspirer des résultats de l’évolution, de la composition d’une feuille, de la forme d’un arbre… C’est par exemple, en observant les baleines et notamment leur nageoire pectorale que des ingénieurs ont permis de construire des éoliennes avec des rendements énergétiques bien meilleurs et qui permettaient d’atténuer les bruits.

 

  • On va également apprendre des processus évolutifs, comment la sélection naturelle se fait, comment elle procède, comment les algorithmes fonctionnent dans la nature. C’est notamment en s’inspirant des fourmis, plus précisément des algorithmes des fourmis, qu’on a imaginé les GPS d’aujourd’hui. La fourmi lorsqu’elle a trouvé un point où il y a de la nourriture, elle va revenir au nid et elle va laisser un signal hormonal pour que les prochaines fourmis aillent directement sur ce point-là. C’est comme ça globalement que fonctionne Waze.

 

  • Et la dernière manière de s’inspirer de la nature, c’est d’apprendre des recettes du succès, c’est-à-dire comment dans les écosystèmes et les organisations les individus fonctionnent entre eux. Comment ils interagissent, et pour quels bénéfices. Et là nous pouvons faire le parallèle avec les réseaux de mycélium, les racines des champignons, qui vont communiquer entre elles des informations et des nutriments ainsi que pour pour les autres végétaux. D’ailleurs pour les forêts nous parlons souvent du terme “Wood Wide Web”, comme le World Wide Web de la nature.

 

 

Thomas Dupeyrat

Pour résumer, le biomimétisme ça peut nous servir d’abord à repenser nos systèmes de conception. C’est-à-dire la manière dont on trouve nos solutions à nos problèmes. Pour qu’on est une vision plus systémique des choses, mais aussi cela peut nous servir dès la conception du cahier des charges pour être plus en adéquation avec la biosphère et être plus durable.

 

 

Marion Simon

Et puis un dernier point, cela permet de se reconnecter au vivant et de retrouver l’envie de le préserver, de le protéger. Cela permet aussi d’inventer des récits, pour imaginer des futurs souhaitables. Il est vrai qu’aujourd’hui on parle beaucoup de ce qui ne va pas et c’est assez anxiogène. Il faut voir et comprendre quels sont les enjeux certes, mais si on a envie d’embarquer tout le monde, il faut imaginer des nouveaux récits souhaitables et désirables, et nous pensons que le biomimétisme peut aider.

 

Du coup nous n’avons qu’à faire l’exercice pour le numérique, quel serait le futur souhaitable du numérique à la sauce bio-inspiré ?

 

 

Thomas Dupeyrat

Je m’essaye à l’exercice, donc je m’imagine en 2040, il fait à peu près 42C, c’est à peu près la température qu’on aura à cette période (Juin), je suis assis sur un coin de table, il y a un super soleil. Je suis à l’arrache, j’ai une présentation dans 5 minutes, mais pas de soucis. En tout cas je n’ai pas de reflets sur mon ordinateur parce qu’il n’y a pas de pixels, pas de rétroéclairage. Mon écran est fait en cellule pigmentaire de pieuvre ou de caméléon, peu importe ils fonctionnent de la même manière. Ce sont de petites cellules qui viennent se gonfler pour situer la couleur mais aussi la texture. Donc on aurait des écrans texturés. Et bonus dans tout ça, ça fonctionnerait avec très peu d’énergie.

 

Pas que l’énergie soit un problème, car tout l’arrière de l’écran de mon ordinateur est comme une feuille, elle va capter le soleil pour me restituer via la photosynthèse, de l’énergie. Donc je n’ai pas eu à recharger mon ordinateur depuis à peu près 1 an.

 

Mais le soir quand je n’ai pas de soleil, l’énergie peut se stocker dans ma batterie façon anguille électrique. C’est-à-dire comme des muscles pleins d’électrolyses, cela vient capter l’énergie et la restituer exactement de la manière dont mon ordinateur a besoin et à la puissance dont il a besoin. Donc une meilleure optimisation que nos batteries actuelles pour utiliser l’énergie.

 

Donc je suis toujours assis sur un coin de table, Marion tu es aussi à l’arrache que moi, nous peaufinons ensemble. Sauf qu’on ne fonctionne pas sur un réseau distant, on échange directement les mises à jour de la présentation via la lumière, c’est low tech et rapide. C’est donc sur une techno li-fi que nous échangeons nos données. Et surtout nous fonctionnons sur un système peer to peer, mais façon fourmis. Vous vous souvenez de Emule, c’est pareil. C’est-à-dire que nous allons décentraliser les informations et, comme dans les colonies de fourmis où il y a une reine mais elle n’a aucun pouvoir de décision, nous nous servirons de la blockchain pour rapporter de légalité et de la vérité là dedans. Puis le disque dur commence à être vite plein, comment faire ? Pas de souci, car les disques durs fonctionneront comme de l’ADN, pour un gramme de disque dur, je pourrais avoir 1 million de tera de donnée, et cela fonctionnerait avec seulement 10W/h dans l’ordinateur, donc excessivement peu.

 

La présentation va commencer, je range mes affaires, dans la précipitation je fais tomber mon ordinateur, et cela ne m’arrange pas tellement car depuis 2030 il existe une loi sur la sobriété numérique qui m’empêche d’avoir plus d’un appareil numérique avec moi, j’aurais donc bien aimé que mon ordinateur me dure un toute la vie. Cela ne m’arrange pas, mais heureusement la coque de mon ordinateur est faite en chitine, c’est exactement la même structure et forme que les carapaces des scarabées diaboliques cuirassés, il est capable d’absorber 39 000 fois son poids. Donc imaginez que pour mon ordinateur qui fait un peu moins d’1kg, un 36 tonnes peut lui passer dessus, il n’y a pas de problèmes.

 

J’espère que cette vision d’un appareil numérique du futur arrive à vous plaire. Moi en tout cas j’aimerais avoir un ordinateur comme ça, mais ce n’est pas demain qu’on va l’avoir.

 

Donc comment aujourd’hui en 2022 arrive-t-on à faire du numérique responsable qui soit bio-inspiré ?

 

 

Il y 5 points pour un numérique responsable bio-inspiré :

 

  • Qu’il soit local. Dans la nature tout est local, l’énergie, les matières premières, tout se cherche localement. A l’instar des castors qui ne vont pas importer leur bois des pays de l’Est, ils vont le chercher au plus près de leur barrage. Dans le numérique nous devrions respecter exactement la même chose. C’est-à-dire que nos données devraient être stockées et idéalement la majorité devrait être échangée de manière locale. De toute façon, nous échangeons la grosse majorité du temps avec nos collègues qui ne sont pas très loin, ou à nos ami·es qui ne sont pas très loin non plus. La majorité des flux pourrait être plus localisée, ainsi que l’hébergement. L’énergie qui va être utilisée par nos appareils numériques, devrait également être plus locale. Idélament il faudrait que ce soit notre ordinateur qu’il la produise elle-même, en circuit fermé et qu’on ne produise que ce dont nous avons besoin. Ainsi, ce serait beaucoup plus local.

 

  • Un numérique responsable bio-inspiré est durable. Dans la nature tout est fait pour évoluer et grossir mais que cela dure au maximum. Prenez par exemple notre corps humain, il est fait pour durer toute une vie, nous n’avons pas de corps de rechange. Par conséquent il va s’auto-réparer, il va évoluer avec nous. Si j’ai besoin de faire beaucoup d’efforts, il va se muscler, si au contraire je suis plutôt sédentaire, je vais prendre du poids. Le numérique devrait être comme ça, c’est-à-dire aussi robuste, il devrait être solide, il devrait aussi être évolutif et fonctionné en boucle fermée. Nous allons avoir besoin de minerais, de terre rare pour avoir des composants dans nos ordinateurs, et la meilleure matière première que l’on pourrait trouver et bien ce sont justement nos anciens composants et se servir de cette matière là. Il faudrait aussi qu’il soit auto régénérant, comme la peau quand on se coupe. Ou, a minima, si ce n’est pas possible que les utilisateur·ices eulleux-mêmes puissent ouvrir l’ordinateur et le réparer, et que nous n’ayons pas besoin de les envoyer à l’autre bout de l’Europe en SAV. Enfin, continuer à lutter contre l’obsolescence programmée matérielle, mais aussi culturelle.

 

  • Qu’il soit sobre. Nous allons continuer à s’inspirer du vivant, dans la nature tout est fait pour être sobre, pour être peu consommateur d’énergie. Une feuille par exemple, ne va capter qu’un 1% de sa capacité solaire, alors que nos panneaux solaires sont à 20% de rendement. Mais un arbre n’a pas besoin de plus d’énergie, de plus cette feuille va rendre beaucoup d’autres services éco-systémique. Un numérique plus sobre cela pourrait représenter des serveurs refroidis de manière naturelle, comme les termitières qui, de par leur forme, ont une ventilation naturelle, qui leur permet même en plein désert d’avoir une température assez fraîche. Il faudrait que nos appareils soient peu gourmands en énergie, il faudrait que toutes les données et tous nos usages soient plus réfléchis, plus sobre. Il faudrait éviter de laisser Twitch en 4k derrière nous juste pour faire une présence, comme nos parents laissaient la télé en fond.

 

  • Un numérique responsable bio-inspiré est un numérique résilient. Dans la nature tout est fait pour s’adapter à des conditions changeantes, tout est fait pour faire place à la vie quoiqu’il arrive. Pour cela elle va miser sur la diversité et sur la décentralisation. La diversité par exemple, si nous avons tous·tes les mêmes sortes de plantes, que nous plantons tous·tes les mêmes plants de tomates, si une maladie, le mildiou, arrive, tout le monde va être affecté et donc personne n’aura de tomates cette saison là. Alors que si nous diversifions les plants de tomates, et donc les ADN de ces plants là, eh bien il n’y aurait que certains plants qui seraient touchés et on nous ne perdrions pas toutes les récoltes. C’est exactement pareil dans le numérique. S’il n’existe que des Google, Amazon, imaginez un AWS qui tombe aujourd’hui, eh bien le numérique va avoir beaucoup de mal à se relever que s’il existait une diversité dans le stockage de données.

 

  • Enfin, il faut qu’il soit systémique. Tout fonctionne en écosystème dans la nature et nous devrions fonctionner de la même manière dans le design. Nous, nous sommes centrés utilisateur·ices, et c’est plutôt une connerie. Nous devrions penser au couple, au groupe, à la famille, à la communauté, à l’écosystème en général. Faire des cartographie des parties prenantes pour voir qui pourrait nous épauler, à qui nous pourrions rendre des services éco-systémique. Il faut également faire des cartographies des impacts, car les solutions trouvées pour nos utilisateur·ices peuvent décaler le problème, décaler son impact sur quelque chose ou quelqu’un d’autre.

 

 

Marion Simon

Le numérique est à l’image de notre société actuelle, il doit être local, sobre, durable, résilient, et systémique. Il faut que le numérique soit de plus en plus au service de la résolution des challenges environnementaux en prenant en compte son propre impact mais aussi ses bénéfices. Et pour cela nous avons voulu vous proposer une grille de lecture conçue spécialement pour l’occasion, afin que vous puissiez aussi de rendre vos produits numériques soutenables et bio-inspirés.

 

Cette grille a vocation à être collaborative, nous voulons vraiment fonctionner comme la nature en open-source. Nous avons repris certains principes du vivant et nous y avons appliqué des cas dans le numérique. En voici 3 exemples :

 

Le premier, optimiser au lieu de maximiser : c’est un grand principe du vivant, dans la nature on est sur de la sobriété et de la frugalité, sur le fait de faire mieux avec moins. Un exemple dans le vivant, ce sont les balanes, des crustacés, qui vont optimiser l’espace qu’elles ont si elles ont un habitat physique limité. Elles vont elles-mêmes réduire la place d’un individu pour pouvoir être le plus optimisé dans l’habitat qu’elles ont.

 

 

Thomas

Un des cas d’applications dans le numérique c’est par exemple Android qui va préférer faire une mise à jour logiciel d’appareil photo pour optimiser la qualité de l’image et rendre vos photos plus belles plutôt que vous vous disiez que vous devriez changer de téléphone car un concurrent fait mieux. Donc au lieu de faire un changement matériel qui lui va être très impactant, on va préférer une optimisation logicielle pour éviter un tel impact.

 

 

Marion

Le deuxième, miser sur la coopération plutôt que la compétition. Dans la nature on essaye de prendre soin de ses alliés et d’être dans une relation gagnant-gagnant pour tout l’éco-système. Par exemple nous pouvons citer le poisson clown et l’anémone. Le poisson clown a la capacité de se protéger des piqures mortelles des anémones et donc de l’utiliser comme un abri protecteur. En échange ses couleurs vives attirent des proies pour l’anémone de mer qui peut se nourrir grâce à cela, et elle fournira les restes au poisson clown. C’est donc une relation gagnante pour les deux.

 

 

Thomas

Pour le gagnant-gagnant dans le numérique nous pouvons prendre Payfit, Qonto et même la connexion avec Slack. Payfit va générer les bulletins de salaire, les fiches de paie etc, va envoyer les informations à Qonto. Qonto va pré-remplir les virements à faire, il ne reste plus qu’à appuyer sur un bouton. De plus Qonto peut envoyer une alerte sur Slack pour dire aux collaborateur·ices que le salaire arrive. C’est un fonctionnement qui fonctionne bien car chaque acteur est centré sur son coeur de métier et n’essaie pas de jouer sur les plates-bandes des autres. On préfère s’associer et se concentrer sur ce qu’on sait bien faire.

 

 

Marion

Dernier exemple, utiliser les ressources avec parcimonie. Dans la nature, nous essayons d’avoir le juste besoin, la juste réponse dans la juste mesure. Par exemple les prédateurs, comme les lions, vont tuer uniquement quand ils ont faim, ils ne vont pas faire de réserve juste au cas où. D’ailleurs, les proies quant à elles, si elles peuvent ignorer le lion qui passe juste à côté d’elles.

 

 

Thomas

Dans le numérique nous pourrions prendre sur cette notion de sobriété l’exemple de la SCNF lorsqu’ils ont mis le WI-fi dans les trains. Au début il y avait une carte qui s’affichait quand on se connectait dans le train, et nous pouvions voir le train qui avançait au fur et à mesure sur la carte. Sauf que cela n’utilisait pas le Wi-fi avec parcimonie. Au contraire le temps de charger toute la carte on épuisait tous nos crédits de wifi. Ils ont donc préféré être plus sobres, utiliser cette ressource de données au minimum. Nous sommes donc passés sur un fil d’ariane qui donne les mêmes informations sans avoir à charger toutes les tuiles de la carte, le fil d’ariane évoluant en même temps que le train.

 

 

Vous aussi venez donner des idées de principes de vivants, ou de cas d’applications dans le numérique. Le but c’est que ce soit collaboratif. Nous avons listé 9 principes du vivant et dans chacun nous avons mis un cas d’exemple dans la nature et des cas d’exemples dans le numérique. N’hésitez pas à venir abonder dans les cas dans du numérique, cela servira à toute la communauté. Vous pouvez trouver l’outil juste ici : https://bit.ly/3x3wKhk

 

 

Pour terminer, ce qu’il faut retenir, c’est que le biomimétisme permet de changer de posture et de retrouver l’envie de se reconnecter au vivant, d’innover en s’inspirer du vivant pour rendre des imaginaires plus souhaitbles et plus durables. Et ça permet également pour le numérique d’être au service d’une vision plus systémique, plus régénérative de l’économie et non techno-centrée, mais plutôt éco-centrée, vivant centré.

 

 

Nous tenions à remercier chaleureusement le Web2Day pour leur accueil, ainsi que son public pour son intérêt porté sur le numérique depuis maintenant plus de 10 ans.

 

 

Allez plus loin sur ces sujets :

Ask Nature : https://asknature.org/

Ceebios : https://ceebios.com/

Institut des futurs souhaitables : https://www.futurs-souhaitables.org/

Biomim’expo, en octobre : https://biomimexpo.com/

Institut Supérieure du Design de St-Malo : https://institut.design/formations/design-des-transitions-et-conception-biomimetique/

 

 

A bientôt ?